jeudi 16 mai 2013

Un ami...


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Un ministre a menti – stupeur sur la ville, le mensonge est effectivement si rare quand il s’agit de politique et d’argent qu’il y a en effet de quoi en tomber sur le cul de saisissement. Le Grand-Guignol peut commencer.  Tout le monde a un avis de la plus haute importance. Moi pas et pire, j’ai quelques doutes sur la morale profonde des Zorro en peau de lapin qui s’essuient les pieds sur les puissants, non sans s’être d’abord assuré du bout de l’orteil qu’ils étaient bien morts. On ne compte plus les pailles et les poutres, ces temps-ci. Le ministre a menti, oui, et fermement. Le ministre a quitté le gouvernement.  Le ministre est politiquement mort. Le ministre a la justice aux fesses. Le reste regarde un justiciable, ses juges et ses avocats.
Dans tout ce vacarme, peut-être serait-il nécessaire, peut-être serait-il humain de rappeler que derrière la cravate, le mensonge et l’arrogance, il y a un homme et que cet homme est à terre ? Peut-être faut-il souligner, à haute voix, que le pouvoir, le calcul et l’argent ne les protège pas de leur propre viande, de la faiblesse, du désespoir et de la peur ? Qu’on se tue pour moins que ça ? Qu’on ne traiterait pas le dernier des chiens comme on traite cet homme déjà mort, déjà puni, déjà perdu ?
Ce n’est pas le ministre, ce n’est même pas l’homme qui me passionne, très franchement. Il a joué, il a triché, il a perdu. Ceux qui m’intéressent, ce sont ses amis – ceux qui à en croire les journaux lui ont tourné le dos. Si c’est vrai, ça me dépasse.
Imaginez. On sonne à votre porte, vous ouvrez. Sur le palier se tient le mec le plus détesté de France. Il vient de conduire 800 kilomètres, l’âme en torche. Il a une gueule de coupable – il est coupable. Il se tourne vers vous parce qu’à cette heure-là, cette nuit-là, il n’a pensé à personne d’autre. Sa seule présence témoigne de l’importance que vous avez pour lui, lui que tout un pays insulte et méprise. L’amertume, les regrets, la colère – qui sait, le remord, le vrai ? – ont roulé avec lui. Il a son costard froissé par la route, la gueule fatiguée. Il vous demande beaucoup et rien à la fois. Un lit, un café ou un verre, un refuge, quelques mots – un seul, en réalité : « Entre. »
Et vous lui refermez la porte au nez.
Ça en dit plus sur l’ami que sur le ministre. Ça en dit plus sur la nature humaine que les serments trahis ou le pognon planqué.  La règle n’est écrite nulle part, on ne l’admire pas, o on ne le félicite pas, on ne l’excuse pas – mais par tous les saints, on ouvre à un ami.
Un ami, ce n’est ni un confesseur, ni un prêtre et encore moins un juge. C’est quelqu’un qui est là pour ne pas refermer sa foutue porte à celui qui se fait claquer toutes les autres au visage. Un ami, ça écoute, ça engueule peut-être, ça allume s’il le faut, ça secoue et ça hurle peut-être, mais ça ouvre sa putain de porte ou ça perd le nom même d’ami. Si ils ne servent pas à ça – à quoi ?
Ils attendaient quoi, ces gens-là, de leur copain devenu ministre ? Qu’il soit sans failles, sans défauts, sans erreurs et sans mensonges ? On a le droit de l’espérer, mais l’exiger, au nom de quoi, de quelle perfection supposée, de quelle conception tordue de l’amitié ? Ce qu’il a fait n’est pas bien ? Il a planqué du pognon ? Et alors ? Le bataillon de tous les petits moralistes de la dernière heure l’attend déjà au coin de la rue, sans compter les gens ordinaires que toute aigreur mise à part, ça ne fait pas rire, ce genre de petites plaisanteries.
Un ami, ça n’est pas chimiquement pur. Ça fait des bêtises. Ça planque des trucs, ça ne dit pas toujours tout – peut-être parce qu’on se repose, entre amis. Un ami, on le pardonne et on le ramasse quand il se casse la gueule, même quand il l’a bien cherché. Et rien n’empêche de lui en coller une bonne au passage pour le punir d’être aussi gland, aussi menteur, aussi décevant et aussi normal. Mais avant tout, on lui donne ce que les autres lui refusent. De son temps, du silence, un jugement remis à plus tard.
___________
Je ne sais pas ce que je vaux comme ami mais je sais ce que valent les miens. Et si ce n’est pas une raison pour faire les cons, que je vous dise : la porte, je ne l’aurais pas refermé, moi.  Je vous le dois bien.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Non. Flûte!
La sensiblerie, la compassion, l'exigence de bienveillance: rien ne justifie qu'on soit neutre.
Cahuzac a juré devant le parlement, il a réitéré ses dénégations partout, et puis, devant les faits, il a plié et encore peut-être contraint et non de son plein gré.
Flûte! il était chargé en tant que ministre de réprimer la fraude! C'est pas rien comme dit ma concierge!
Et puis, auteur anonyme, mais complaisamment relayé par Vigilo, probablement épuisé ( Vigilo, pas l'auteur): vous trouvez qu'on a été très dur avec Cahuzac? allez voir ce qu'on répand sur Barjot, Boutin, Gosselin, Mariton etc.
Et là, anonyme et compatissant auteur on ne vous entend pas. Pardon pour les socialistes (merde quoi, les pauvres! ils luttent pour les masses) et dédain pour le reste?
Flûte à la fin, égalité de traitement pour les injustices, quand il y en a et qui qu'elles concernent!
Vivement l'Esprit Saint, qui n'est pas partisan, Lui.
R.

BL a dit…

un petit coup de sang on dirait...
A noter tout de même afin de garder la tête froide que ce texte (dont l'auteur est un confrère) ne se prononce pas sur la moralité du personnage (là c'est assez clair !) mais sur celle de ses prétendus amis...
En Espérant que l'Esprit de Pentecôte ait assoupli ce qui était tendu...

Anonyme a dit…

Là ça va c'est le fric de l'Etat mais si c'était celui des "amis"????