lundi 17 décembre 2007

Aimer Mauriac

A la faveur de huit jours de cours donnés au séminaire de Bordeaux, j’ai fait, comme chaque année à la même époque, mon pèlerinage à Malagar, le refuge girondin de François Mauriac.
Le soleil d’hiver brillait, radieux, sur les vignes dépouillées de leurs feuilles. L’air était vif, piquant et léger tout à la fois.
Un passage obligé sur la terrasse. "Il me reste d'aller jusqu'à la terrasse, d'appuyer mes mains à la pierre, d'y chercher comme les rides d'un visage maternel, de recueillir, d'absorber une dernière fois les longs pays muets." (Mémoires intérieurs). Contempler les vignes dans la lumière rasante du couchant maintenant proche, fermer les yeux, toucher la pierre, respirer à pleins poumons.
Remonter l’allée conduisant au logis et mettre ses pas dans ceux qui nous ont précédé. S’attarder sur le palier, ne pas entrer brusquement, faire preuve de douceur, attendre de s’y sentir invité.
Au fil des pièces, tendre l’oreille vers l’écho d’une voix brisée qui chuchote : "J'ai lu dans l'admirable livre d'Ernest Hemingway : Mort dans l'après-midi, que les Espagnols appellent querencia l'endroit de l'arène choisi par le taureau et où il se réfugie (…). Malagar est ma querencia. De sa terrasse, j'espère regarder l'éternité sans trop cligner des yeux…" (Les maisons fugitives).
La salle à manger aux couleurs de soleil et de miel, le salon rempli des souvenirs familiaux, le bureau où l’on entre en descendant trois marches et où se trouve une gravure du Christ touchante entre toutes…
" Ce ne sont pas les pierres qui gardent l'empreinte des mains, le reflet des visages, la forme, l'ombre des êtres disparus, mais ces prolongements d'eux-mêmes : tentures, rideaux, tapisseries, badigeon des boiseries..." (Les maisons fugitives)

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