jeudi 28 mai 2015

Voulez-vous avoir la Sainte Vierge pour belle-mère ?

Voici un extrait d'un échange entre le pape François et les élèves des collèges et couvents pontificaux de Rome le lundi 12 mai 2014 à la salle Paul VI, Cité du Vatican. Et toujours des images assez saisissantes...

Bonjour Saint-Père. Mon nom est Daniele Ortiz et je suis mexicain. Ici à Rome, j’habite au collège Maria Mater Ecclesiae. Votre Sainteté, dans la fidélité à notre vocation nous avons besoin d’un discernement constant, de vigilance et de discipline personnelle. Vous, comment avez-vous fait quand vous étiez séminariste, quand vous étiez prêtre, quand vous étiez évêque et maintenant que vous êtes Pape ? Et que nous conseillez-vous à cet égard ? Merci.

Merci. Tu as prononcé la parole vigilance. C’est une attitude chrétienne : la vigilance. La vigilance sur soi-même : que se passe-t-il dans mon cœur ? Car là où est mon cœur se trouve mon trésor. Que se passe-t-il là ? Les pères orientaux disent qu’il faut bien savoir si son propre cœur est dans une turbulence ou s’il est tranquille. Première question : être vigilant sur ton cœur : est-il dans une turbulence ? S’il est pris dans une turbulence, on ne peut pas voir ce qu’il y a dedans. Com me la mer, n’est-ce pas ? On ne voit pas les poissons quand la mer est ainsi... Le premier conseil, quand le cœur est pris dans une turbulence, est le conseil des pères russes : se placer sous le manteau de la Sainte Mère de Dieu. Rappelez-vous que la première antienne latine est précisément celle-là : en période de turbulence, chercher refuge sous le manteau de la Sainte Mère de Dieu. C’est l’antienne « Sub tuum presidium confugimus, Sancta Dei Genitrix » : c’est la première antienne latine de la Vierge. C’est curieux non ? Veiller. Il y a une turbulence ? Tout d’abord aller là, et attendre là que le calme revienne un peu : avec la prière, en se remettant à la Vierge... Certains d’entre vous me diront : « Mais, père, en cette époque de tant de modernité efficace, de la psychiatrie, de la psychologie, dans ces moments de turbulence je crois qu’il serait mieux d’aller chez le psychologue pour qu’il m’aide... ». Je n’écarte pas cette idée, mais il faut tout d’abord aller vers la Mère : car un prêtre qui oublie la Mère, surtout dans les moments de turbulence, a un manque. C’est un prêtre orphelin : il a oublié sa maman ! Et dans les moments difficiles, l’enfant va voir sa maman, toujours. Et nous sommes des enfants, dans la vie spirituelle, il ne faut jamais l’oublier ! Veiller sur comment va mon cœur. En période de turbulence, aller chercher refuge sous le manteau de la sainte Mère de Dieu. C’est ce que disent les moines russes, et en vérité il en est ainsi. Ensuite, que dois-je faire ? Je cherche à comprendre ce qui arrive, mais toujours dans la paix. Comprendre dans la paix. Ensuite, la paix revient et je peux faire la discussio conscientiae. Quand je suis en paix, il n’y a pas de turbulence : « Qu’est-ce qui est arrivé aujourd’hui dans mon cœur ? ». Et cela est veiller. Veiller ce n’est pas aller dans une salle de torture, non ! C’est regarder son cœur. Nous devons être maîtres de notre cœur. Que sent mon cœur, qu’est-ce qu’il cherche ? Qu’est-ce qui aujourd’hui m’a rendu heureux et qu’est-ce qui ne m’a pas rendu heureux ? Il ne faut pas finir la journée sans faire cela. Une question que je posais, comme évêque, aux prêtres est : « Dis-moi comment tu vas te coucher ? ». Et ils ne comprenaient pas. « Mais qu’est-ce que ça veut dire ? ». « Oui, comment finis-tu la journée ? ». « Oh, épuisé, père, car il y a beaucoup de travail, la paroisse, beaucoup... Après je dîne un peu, je mange quelque chose et je vais au lit, je regarde la télévision et je me relaxe un peu... ». « Et tu ne passes pas devant le tabernacle avant ? ». Il y a des choses qui nous font voir où est notre cœur. Jamais, jamais — et c’est cela la vigilance ! — ne jamais finir la journée sans aller un peu là, devant le Seigneur ; regarder et demander : « Qu’est-ce qui se passe dans mon cœur ? ». Dans les moments tristes, dans les moments heureux : comment était cette tristesse ? Comment était cette joie ? C’est de la vigilance. Veiller également sur les dépressions et les enthousiasmes. « Aujourd’hui je suis démoralisé, je ne sais pas ce qui arrive ». Veiller : parce que je suis démoralisé ? Peut-être devrais-tu aller chez quelqu’un qui t’aide ?... Cela est de la vigilance. « Oh, je suis joyeux ! ». Mais pourquoi suis-je joyeux aujourd’hui ? Qu’est-ce qui est arrivé dans mon cœur ? Cela n’est pas une introspection stérile, non, non ! Cela est connaître l’état de mon cœur, ma vie, comme chemin sur la route du Seigneur. Car s’il n’y a pas de vigilance, le cœur va de tous les côtés ; et l’imagination suit derrière : « Vas, vas... » ; et ensuite cela peut mal finir. J’aime cette question sur la vigilance. Ce ne sont pas des choses anciennes que celles-ci, ce ne sont pas des choses dépassées. Ce sont des choses humaines, et comme toutes les choses humaines, elles sont éternelles. Nous les aurons toujours avec nous. Veiller sur son cœur était précisément la sagesse des premiers moines chrétiens, ils enseignaient cela, à veiller sur le cœur. 

Puis-je faire une parenthèse ? Pourquoi est-ce que j’ai parlé de la Vierge ? Je vous conseillerais ce que j’ai dit auparavant, chercher refuge... Un beau rapport avec la Vierge ; le rapport avec la Vierge nous aide à avoir un beau rapport avec l’Église : toutes les deux sont Mères... Vous connaissez le beau passage de saint Isaac, l’abbé de l’Etoile : ce que l’on peut dire de Marie, on peut le dire de l’Église et également de notre âme. Toutes les trois sont féminines, toutes les trois sont des Mères, toutes les trois donnent la vie. Le rapport avec la Vierge est un rapport de fils... Veillez sur cela : si l’on n’a pas un beau rapport avec la Vierge, il y a quelque chose d’orphelin dans mon cœur. Je me souviens, il y a trente ans, j’étais dans le nord de l’Europe : je devais aller là pour des question d’éducation de l’université de Cordova, dont j’étais à ce moment là vice-chancelier. Et une famille de catholiques pratiquants m’a invité ; c’était un pays un peu trop sécularisé. Et à dîner, il y avait beaucoup d’enfants, c’était des catholiques pratiquants, tous les deux professeurs universitaires, tous les deux aussi catéchistes. A un certain moment, en parlant de Jésus Christ — enthousiastes de Jésus Christ !, je parle d’il y a trente ans — ils ont dit : « Oui, grâce à Dieu nous avons dépassé l’étape de la Vierge... ». Et comment cela se fait-il ?, ai-je dit. « Oui, parce ce que nous avons découvert Jésus Christ, et nous n’en avons plus besoin ». Cela m’a attristé et je n’ai pas bien compris. Et nous en avons un peu parlé. Et cela n’est pas de la maturité ! Ce n’est pas de la maturité. Oublier la mère est une mauvaise chose... Et, pour le dire en d’autres termes : si tu ne veux pas la Vierge comme Mère, tu peux être sûr que tu l’auras comme belle-mère ! Et cela n’est pas bon ! Merci.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

merci